Biorotor: très efficace, mais toujours sous-estimé en épuration des eaux usées

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LE BIOROTOR SOUS-ESTIME – Un classique qui ne se démode pas

(Ecomagazine juin 2008)

Cela fait plus de 10 ans maintenant, que le parc animalier de Planckendael a prouvé qu’opter pour un biorotor, pour traiter les eaux usées provenant des volières des oiseaux malades, a été la solution idéale. Malheureusement il n’y a que peu de sociétés belges à suivre leur exemple. Et c’est dommage, parce que sur le long terme, les avantages n’en sont pas négligables.

Planckendael est un parc jeune, étendu et ouvert avec des enceintes pour animaux spacieuses, bien intégrées dans le paysage. Quelques parties du parc restent intouchées, permettant aux visiteurs de trouver des plantes et fleurs sauvages tout au long de l’année. Le parc attache beaucoup d’importance à la gestion durable (ces efforts ont été couronné en 2004 par le AEB – Association des entreprises belges – avec le prix pour la meilleure gestion environnementale).

Et depuis plus de 15 ans, le Prof. Rik Van de Werf, professeur en Protection de l’ Environnement à la Haute Ecole Erasme de Bruxelles et professeur en Techniques Environnementales à la VUB (Université Libre de Bruxelles), joue un rôle important dans ce domaine. Parce que c’était lui qui a conçu en 1994 une installation pour l’épuration des eaux usées provenant d’une partie importante des enclos animaliers, des installations sanitaires, de la cuisine animalière et du restaurant.

D’eau usée à eau potable

Trois ans après, la direction du parc s’est à nouveau adressé au professeur. Parce que Planckendael était forcé de trouver une solution pour les eaux usées provenant de l’enclos élevage des oiseaux. Ces eaux étaient rejetées dans un affluent du ruisseau Barebeek, mais la nouvelle législation a imposé une épuration préablable de ces eaux usées. Après une analyse approfondie de la problématique, le Prof. Rik Van de Werf a conclu que la combinaison d’un biorotor avec un marais artificiel fut la meilleure solution. Il explique pourquoi : “Ce système résiste bien à la variation du niveau de pollution, ce qui est vraiment nécessaire, car en été il y a beaucoup plus d’oiseaux jeunes dans les cages, et donc plus d’eaux polluées, qu’en hiver. En plus, cette solution ne prend guère de place. Avec les 100 m² que l’on eut à notre disposition, ce fut un avantage non négligable.”

De quoi s’agit-il

Le biorotor consiste en un cylindre dans lequel se trouve un arbre rotatif sur lequel des disques circulaires sont montés. “65 au total”, clarifie le Prof. Van de Werf. “D’un côté, l’eau entre, de l’autre côté, l’eau purifiée resort. Entre tous ces disques, il y a un garnissage synthétique poreux. Chaque pore a une surface bien définie. Très petite bien sûr, mais quand on additione la surface de toutes ces pores, on obtient une surface totale substantielle. A peu près un tiers de chaque disque se trouve dans les eaux usées. Quand l’arbre se met à tourner, la partie mouillée du disque atteint la surface, permettant à l’oxygène d’entrer dans les pores et de se mettre en contact avec les micro-organismes qui poussent dedans. Ces microbes se nourissent des polluants dans les eaux usées, les purifiant ainsi. Après un certain temps, ils vont produire des plaques de boue entre les disques; ces plaques de boue vont finir par se détacher et tomber dans l’eau en gros morceaux, qui seront ensuite séparés de l’eau par un filtre à sable installé en aval.”

Quand les eaux usées ne s’avèrent pas suffisamment purifiées après passage par le biorotor, les eaux sont conduites à travers un filtre à sable pour finir dans un marais artificiel (juste 1,5 mètres plus loin). Le Prof. Van de Werf explique: “Les marais artificiels sont plantés d’hélophytes, poussant en partie sous eau, comme le roseau. L’eau ondule lentement entre les rhizomes des plantes. Sur ces rhizomes poussent des micro-organismes, se nourissant des restes de polluants dans l’eau. Les micro-organismes qui ne se nourissent pas des polluants de l’eau sont désavantagés, comparé à ceux qui le font bien. Les micro-organismes qui se nourissent des polluants de l’eau vont donc absorber plus de nutritifs, leur métabolisme produira plusieurs substances, servant à leur tour de nutition pour les hélophytes. La plante elle-même va produire de l’oxygène, qui sera mené par la tige creuse jusqu’aux bactéries, les permettant ainsi de respirer. De cette façon, la plante et les micro-organismes s’entraident et collaborent pour éliminer les polluants de l’eau.”

Bon pour l’environnement et économique

Ce système est bon pour l’environnement et très économique à l’usage : les eaux sont purifiées de façon complètement naturelle, la seule énergie requise est celle (minimale) pour faire tourner l’arbre du biorotor. La question peut se poser pourqoui ce système n’est pas utilisé sur une plus grande échelle. Parce que le biorotor, tel mis en oeuvre à Planckendael, ne se voit que très peu dans les installations industrielles.

Stefaan Kovacs, directeur de la société Task Ingénierie Environnementale, qui a réalisé la station d’épuration des eaux usées, conçue par le Prof. Van de Werf, commente .  “Dans un environnement industriel, l’on utilise surtout des procédés « à boues activées ». L’eau est mélangée avec des micro-organismes dans de grands bassins d’aération, ce qui donne des flocons de boues, qui seront séparés de l’eau dans des bassins de décantation. Un biorotor fonctionne également selon ce principe de boue sur un support. Les systèmes à boues activées sont généralement plus économiques à l’achat (surtout pour des application résidentielles ou à petit échelle) qu’un biorotor et n’exigent pas de seconde phase sépararée pour obtenir des eaux entièrement libérées de nutritifs. Les procédés à boues activées, de même que les systèmes à biorotor, dans leur configuration de base, ne suffisent souvent pas en tant que tel pour purifier les eaux entièrement. De l’autre côté, l’avantage du procédé à boues activées est que l’épuration supplémentaire peut, dans la plupart des cas, être intégrée dans une installation existante, ce qui est moins cher que de devoir ajouter un autre module, ce qui serait le cas avec un biorotor. Un exemple de purification supplémentaire, facile à intégrer dans un procédé à boues activées, est celui de l’élimination de phosphore et d’azote des eaux usées industrielles.  Le phosphore s’élimine par l’addition de certains produits chimiques, tels que le fer ou le chlorure d’aluminium, tandis que l’azote s’élimine de façon microbiologique.

Néanmoins, je pense que ces deux désavantages sont largement compensés par les avantages du biorotor. L’aération du biorotor se fait de façon naturelle, sans devoir faire recours à un compresseur pour l’apport de l’air; il ne faut qu’un seul moteur pour entraîner l’arbre avec les disques. Le procédé à boues activées, au contraire, demande plusieurs pompes à air à entraînement électronique et entièrement automatiques, ce qui résultera en une consommation d’énergie 10 fois plus élévée. Une installation avec biorotor ne demande presque aucun entretien et en plus, le principe de l’installation étant très simple, tout problème potentiel se résout rapidement. Ce coût opérationnel inférieur pour l’aération des biorotors peut faire de ce système le plus économique à la longue, comparé aux autres systèmes d’épuration.  Et en plus, j’ai oublié de mentionner que le biorotor ne demande que très peu de place… Je pense que l’industrie a une vue beaucoup trop restreinte sur les avantages des biorotors, surtout les avantages à long terme ne peuvent pas être négligés. Les industries qui produisent des eaux usées biodégradables ont tout intérêt à penser à une solution à biorotor. Pensez par exemple aux entreprises agricoles et à l’industrie alimentaire, tel que les usines de transformation et conservation de légumes.”

Et aussi pour les stations d’épuration des eaux usées municipales relativement petites, tels que les hameaux résidentiels éloignés, des campings, etc., un biorotor peut être une alternative intéressante.

www.planckendael.be